La perforation de l’intestin(1)

■ Le bouddha vivant Lian-sheng Sheng-yen Lu

■ La Claire Lumière ici et maintenant

Illumination sur le trouble de l'esprit

■ Traduit du chinois par Sandrine Fang

■ Copyright © Sheng-yen u ©2015, Éditions Darong

Après le chapitre « La légende d’un peintre », je me souviens maintenant d’une histoire concernant le peintre Tian Ning. Celui-ci avait un très beau physique, c’était quelqu’un de marque avec un air distingué et élégant.

Tian Ning vint me demander de prati-quer pour lui la divination.

Je lui dis :

— Votre teint est excellent.

Tian Ning fut comblé de joie.

D’après mon examen, l’origine de Tian Ning était bonne, il était né à Ho-nan (une province de Chine), dans le district Ling-bao. D’après ce qu’on dit, cet endroit avait été le mont des Tambours et des Cloches sur lequel Huang Ti (le Souverain Jaune, empereur lé-gendaire) avait officié.

Si, lors de sa naissance, Tian Ning avait reçu une énergie terrestre, il était, notam-ment dans ses vies antérieures, de nature di-vine. Qu’est-ce que la nature divine ? C’est que, dans plusieurs vies antérieures, il avait été l’incarnation d’un esprit céleste.

Cet esprit céleste s’appelait « l’esprit divin Yuan-chao ». Lequel est un dieu de la nature, il s’occupe des montagnes, des fleuves, de la terre, il vole de temps en temps dans l’es-pace, il voyage partout au-dessus des quatre océans, et il adore la magnificence du pay-sage. Quand il vole, il se manifeste par une masse de lumière scintillante.

Cet esprit divin séjourne dans les nu-ages, à mi-hauteur du ciel, dans un endroit appelé Yuan-pou. C’est un jardin du Souve-rain du Ciel, et il est régi par l’esprit divin.

J’expliquai tout cela à Tian Ning ; il con-sidéra pourtant que je racontais une fable. Ayant entendu mon propos, il n’esquissa qu’un sourire.

 

 

 

 

 

 

C’était effectivement le récit d’un esprit divin. On peut y croire, on peut aussi ne pas y ajouter foi, alors on le laisse de côté avec un sourire.

Cependant, sur sa carte de visite, Tian Ning, qu’importe qu’il y crût ou pas, avait fait imprimer deux mots en plus au-dessous de son nom, et ces deux mots étaient « Yuan-chao ».

Yuan-chao était précisément le surnom de Tian Ning.

D’après moi, la raison pour laquelle Tian Ning devenait un grand peintre, c’est qu’il aimait la beauté de la nature : les montagnes vertes, touffues, épaisses et l’eau d’une cou-leur argentée qui se joint au ciel !

Quelque temps après, je rencontrai Tian Ning et j’eus un sursaut, car son apparence n’était plus comme avant, elle était beaucoup moins belle qu’autrefois.

Je demandai :

— Êtes-vous malade ?

— Non.

— Qu’est-ce qui vous est arrivé ?

— Rien.

— Votre souffle originel est déjà parti ! dis-je bien sincèrement d’après la réalité.

Tian Ning haussa ses épaules, les bras ou-verts, en montrant une attitude indifférente.

En revanche, j’avais plein de sollicitude à l’égard de cet ami peintre. Je dis :

— Est-ce que vous voulez que je prati-que la divination pour vous ?

— Je n’en ai pas besoin.

J’avertis Tian Ning :

— Votre souffle originel s’est gravement délabré, et une énergie néfaste couvre votre visage. Soyez prudent !

Tian Ning dit :

  

Merci de votre prévenance ! Je me porte bien, et tout se passe bien.

En fait, Tian Ning ne dévoilait pas son secret, mais je vis nettement qu’une masse de lumière blanche qui s’était trouvée au-dessus de sa tête avait déjà disparu. Ce dont je me souciais n’était pas la disparition de la lu-mière blanche, mais un brouillard funeste qui se manifestait et qui enveloppait petit à petit son corps. Si ce brouillard néfaste le recou-vrait entièrement, il se pourrait qu’un mal-heur se produise.

*

Je me rendis chez le meilleur ami de Tian Ning et lui demandai :

— Comment va Tian Ning ?

— Il va à merveille !

— Comment à merveille ?

— Il a eu un bonheur galant.

Le meilleur ami de Tian Ning me racon-ta l’intrigue :

— Tian Ning a pris un train, ce train était le dernier de la soirée et il n’y avait qu’une femme et lui dans le wagon. Quelle coïncidence ! Elle s’était assise juste en face de lui, et ils se regardaient dans les yeux.

Tian Ning admirait beaucoup cette femme. Elle était pour lui la plus belle de toutes, elle avait non seulement une beauté physique mais aussi un charme particulier.

Cette femme n’était pas maquillée mais elle était fort séduisante.

Elle portait un vêtement unicolore mais gracieux.

Cette femme n’évita pas les regards de Tian Ning mais porta fréquemment ses yeux sur ce dernier.

Tian Ning l’interrogea :

— Vous êtes toute seule ?

— Bien sûr que je suis toute seule. Y a-t-il un autre passager ? répondit-elle d’une ma-nière coquine.

Tian Ning se mit à rire. Effectivement, sa question était bêtement posée.

— Votre mari ?

— Mon mari est décédé, il y a peu de temps !

Oh ! Son conjoint était mort, elle était récemment entrée dans son veuvage !

La physionomie de cette femme parais-sait souriante, mais en fait elle ne l’était pas. Quand ses regards se dirigèrent vers Tian Ning, le cœur de ce dernier s’agita.

Ses cheveux étaient fins et luisants, sa bouche petite comme une cerise, ses dents blanches comme des coquilles, sa peau fra-gile au souffle et à l’attouchement. Son vête-ment noir s’harmonisait bien avec la beauté de sa peau et sa jolie taille.

Tian Ning s’entendait bien avec elle. Au fil de la conversation, cette femme laissait entendre qu’elle avait besoin de refaire sa vie après la mort de son mari. Tian Ning répon-dit immédiatement à ses propos en disant qu’il pourrait l’engager comme mannequin.

La femme demanda :

— En tant que modèle, il faut posséder un bon physique, est-ce que je suis appro-priée ?

Tian Ning répondit :

— Vous seriez à la première place parmi dix mille candidates.

— Vraiment ? dit-elle, les yeux brillants.

Ayant des démangeaisons au cœur, Tian Ning repartit :

— On peut faire un essai sur-le-champ ! On le saura par l’attouchement instantané !

 

(la suite au prochain numéro)