Le spectre rancunier(4)
Avec le talisman de coupe, je sauvai Chiang Chung de son infortune en délivrant
le spectre rancunier qui s’attachait à lui, et en lui ordonnant d’aller transmigrer dans les SixVoies du samsâra.
La Fée mystérieuse du neuvième ciel a laissé au genre humain un texte concernant
l’abstinence de lubricité :
Vous tous, quand vous débauchez une
femme, vous devez penser immédiatement
que si au même moment votre
épouse est dévergondée par autrui, s’adonne
aux plaisirs dans le lit et rit sur
l’oreiller avec des cris obscènes, des propos
égrillards et l’esprit complètement
absorbé par l’union sexuelle, alors, si
vous êtes à côté et voyez une telle situation,
vous aurez certainement le coeur
piqué par une épine. Le feu de colère
ardent apparaîtra dans vos yeux et vous
poussera à un assassinat comme seule
suite possible à faire sans tarder. À ce
moment, à cet instant, qui peut supporter
cette humiliation ?
L’être humain existe entre le ciel et la
terre, il reçoit l’énergie gracieuse des
Cinq Éléments et possède un aspect
éminent et probe. Homme, époux,
femme, épouse, la voie du Ciel suit les
principes célestes et la voie de l’Humanité
se conforme aux principes moraux.
Si on enfreint les lois de la bienséance,
si on a une union incestueuse,
on s’assimile alors au bétail. En plus, le
balbuzard pêcheur reste fidèle à son
partenaire et n’est pas incestueux, la
malheureuse oie sauvage crie solitairement,
ne volant pas en couple. Voilà la
raison pour laquelle l’homme ne vaut
pas mieux que l’oiseau, il porte bien
vainement le nom d’humain, il n’est pas
meilleur que le bétail !
La plupart des gens doivent s’abstenir
de débauche ; les pratiquants de la
perfection sont bien évidemment obligés
de se soustraire à la lubricité. En fin
de compte, la pensée libertine s’enracine
dans la lasciveté ; si on veut déraciner la
luxure, il faut d’abord s’abstenir avec rigueur
de lasciveté. Si on incline à la lubricité,
on s’adonnera certainement à la
débauche, avec une conduite qui demeurera
dépravée. Si on ne peut se contrôler
devant les poses aguichantes et les
silhouettes séduisantes, on est donc
dompté par eux. On comprend par là
que l’épouse, la concubine et les enfants
perdront leur défense, se laisseront
souiller par autrui. C’est aussi de la stupidité
et de l’ignorance.
Pour les débauchés, de toute évidence,
leurs enfants et petits-enfants mourront
prématurément et leurs descendants
n’au- n’auront absolument pas de destin
prospère. À cet instant d’inconduite, les
esprits célestes et les génies spectraux
arrivent au-dessus de la tête. L’oeil divin
comme l’éclair se trouvent justement
tout près. Le Ciel est en colère, les gens
gardant de la rancune, il y aura certainement
des sanctions. Des infortunes
arriveront en peu de temps, aussi rapidement
que l’on tourne les talons.
Après l’exhortation faite jusqu’ici,
n’éprouve-t-on pas un froid au coeur ?
Le corps se sacrifie pour une épée tranchante,
la tête se brise au lit, votre rêve
ensoleillé n’est pas encore fini, l’état infernal
s’est déjà tapi, le phosphore vert
et le sang rouge sont tous des drames
faits par la luxure. La belle femme est
originairement une mégère qui mange
l’homme sans recracher les os. Pourquoi
ne croyez-vous pas ? Pourquoi ne croyezvous
pas ?
Je lis le texte de l’abstinence de lubricité
que la Fée mystérieuse du neuvième ciel a
écrit, et mon coeur se met sur ses gardes ; je
veux aussi que tout le monde soit encore plus
sur ses gardes !
Le moine ayant cédé à la
séduction(1)
Le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu
■ La Claire Lumière ici et maintenant
Illumination sur le trouble de l'esprit
■ Traduit du chinois par Sandrine Fang
■ Copyright © Sheng-yen Lu ©2015, Éditions Darong
Quand j’étais jeune, j’ai entendu l’histoire
du moine ayant cédé à la séduction.
Cette histoire met fortement en garde, je la
garde en mémoire, inoubliable, ineffaçable.
J’espère qu’à travers elle, les pratiquants de la
perfection observeront les préceptes encore
plus fidèlement.
Voici l’anecdote du moine ayant cédé à
la séduction :
Un moine qui pratiquait avec persévérance
l’ascèse et qui supportait pleinement
l’attaque du vent et du givre, vivait seul à la
montagne, dans une chaumière, et s’adonnait
à la pratique de la perfection.
Silencieusement, le moine passa ainsi
vingt ans de sa vie. Ses aliments n’étaient que
des fruits et des légumes sauvages. Ses vêtements
étaient complètement usés, ne pouvant
plus couvrir tout son corps.
Un jour, quelqu’un découvrit la présence
de ce moine dans la montagne, et la nouvelle
se répandit loin, très loin. Les gens estimaient
que la pratique ascétique de ce moine
ne pouvait être égalée par eux car il n’était
pas descendu de la montagne depuis vingt
ans, les tribulations qu’il avait vécues étaient
abondantes, et sa capacité de vivre seul faisait
que les gens éprouvaient un grand respect
pour lui. Même au plus fort des hivers,
il était apte à survivre.
Quelqu’un fit courir le bruit que le moine
vivait avec un tigre et un serpent venimeux,
que ces derniers ne lui faisaient pas de mal et
qu’ils étaient même devenus ses protecteurs
dharmiques.
Après la diffusion de cette nouvelle, les
gens qui habitaient au pied de la montagne
commencèrent à lui rendre visite. Au début,
il n’existait aucun chemin, mais peu à peu, un
sentier sinueux apparut, qui conduisait jusqu’à
l’emplacement où le moine s’exerçait à
la pratique de la perfection. Sous les pas de
tous ces gens, le chemin apparu progressivement
devenait un passage bien tracé.
Le logis du moine s’était beaucoup amélioré.
Les gens qui habitaient au pied de la
montagne s’apprêtèrent à l’aider à édifier un
grand temple, pour que plus de personnes
puissent se cultiver auprès de lui.
La moralité du moine vertueux se répandait
de loin en loin. En peu d’années, il
devint célèbre au loin comme dans les environs,
et tout le monde estimait qu’il était un
« moine éminent ».
Au pied de la montagne vivait un seigneur
; c’était un grand propriétaire, riche à
milliards, avec de l’autorité et aussi une
grande influence.
Lors de l’anniversaire de ce seigneur, les
gens de la région se rassemblaient en foule,
même les voisins éloignés arrivaient en hâte
pour participer à la fête. Ce qui faisait que cet
endroit se remplissait d’enthousiasme comme
si c’était le réveillon.
Cette année-là, le seigneur prépara, comme
d’habitude, une succession de banquets au
fur et à mesure de l’arrivée des invités qui
vinrent célébrer son anniversaire.
Cependant, le seigneur constata que le
nombre de convives était peu important,
quelques petits groupes seulement, même les
personnes importantes de la région étaient
absentes. Cette situation l’ébahit.
En fait, c’était le jour où le moine éminent
présidait une cérémonie dharmique. Ce
religieux illustre avait, dans le coeur de la
population, déjà dépassé le seigneur et était
devenu une personnalité de rang aussi respecté
que le chef du gouvernement. Son enseignement
du dharma était comme un vent
tourbillonnant ; en plus, il délivrait des vagues
et encore des vagues de légendes. Puisqu’il
était respecté et vénéré par les gens, la
cérémonie religieuse qu’il présidait attirait
une marée humaine.
(la suite au prochain numéro)